05.12.2018
Je
suis dans l'avion. Le voyage aller m'a emmenée dans le désert.
J'avais envie de ça. De dormir dans le désert. Il faut se méfier
de ses vieux rêves.
Je
n'avais pas peur. J'ai rarement peur, d'ailleurs. Je ne vois pas le
danger. Je voulais les dunes, je voulais les mirages, je voulais le
bleu lumineux, je voulais les nuits fraîches, je voulais les étoiles
filantes et les vœux sitôt oubliés, tu m'as envoyé sur mon
téléphone portable deux pages extraites du Cours
des Glénans sur,
notamment, La
navigation astronomique, j'ai
souri.
Je
ne comprends rien aux modes d'emploi, je ne comprends rien aux
manuels d'utilisation, je n'ai jamais exploré toutes les
fonctionnalités de mon appareil-photo. J'aime me perdre.
Après
le désert, il y a eu cette femme. Cette femme au foulard noir sur la
tête et sa fille aux yeux verts clairs et aux longs cils. Je ne les
ai pas photographiées. Nous nous sommes croisées deux soirs de
suite sur la place Jemaa el-Fna.
Son
regard m'a attrapée. Je lui ai souri comme je souris parfois. Je
sais que mes yeux brillaient à ce moment-là. Elle voulait me vendre
un paquet de mouchoirs pour quelques dirhams. Je lui ai glissé une
pièce. Mais des mouchoirs, j'en avais déjà plein les poches.
Je
suis dans l'avion et son visage me reste en mémoire, celui de sa
fille aussi et de ses grands yeux verts. Leurs deux silhouettes et
les seuls deux/trois mètres qui nous séparaient les unes des
autres. Viennent-elles là tous les soirs?
Je
déteste les séparations.
Je
déteste me séparer.
Quand
il y a Amour, il y a forcément séparation.
Qu'elle
soit ponctuelle, désordonnée ou inévitable.
Un
jour ou l'autre, tu partiras en mer.
Un
jour ou l'autre, j'arriverai au Maroc par Tanger.
Les
vieux rêves sont faits pour se réaliser.